Une résidence de logements dans un éco-quartier flamband neuf à Solliès-pont
Publié le 06.02.24 - Temps de lecture : 3 minutes

« On fermait une classe tous les ans… désormais on les rouvre ! »

Attirer des jeunes actifs et les aider à se projeter dans sa commune grâce à des parcours résidentiels désirables et abordables, c’est le combat du Dr André Garron, maire de Solliès-Pont depuis 2008, qui a transformé sa ville par le logement.

Selon vous, quel rôle les maires doivent-ils jouer dans la production de logements en France ?

André Garron : Heureusement qu’il y a les maires, car ce sont eux qui produisent les logements sociaux. Ceux-ci subissent et pallient les insuffisances des réglementations successives : la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU), la loi Duflot 1 qui a rehaussé le seuil minimal de logements sociaux de 20 % à 25 % du parc de résidences principales, ou encore la loi ELAN. Les maires ne doivent pas tout attendre de l’État ; ils doivent faire du logement social. Nous, on l’a fait à Solliès-Pont, on voulait créer un marché locatif pour aider les gens dans leur projet de vie. L’enjeu numéro un, c’est de répondre aux besoins des populations. Pour ça, la volonté du maire est déterminante.

Justement, qu’est-ce qui vous a poussé à construire de nombreux logements sociaux ces dernières années ? 

A.G. :  Notre situation géographique, à quelques kilomètres au nord de Toulon et de Hyères, dans un département très recherché, attire énormément de monde. D’un côté beaucoup de retraités, et de l’autre la difficulté de fixer des jeunes et des familles. Nous avons connu un essor démographique violent dans les années 1980-90. Le nombre d’habitants a doublé en 20 ans, quadruplé en 30 ans. Nous avons gagné 8000 habitants en 30 ans, sans aménagements urbains adaptés. On avait un centre ancien, un peu archaïque, aux logements inadaptés et souvent insalubres, au milieu d’un territoire agricole, puis la commune s’est orientée vers le pavillonnaire… Le marché locatif était quasi inexistant. Il y a eu une fin de cycle démographique avec une population légèrement décroissante et surtout vieillissante, ce qui devenait très problématique, avec une fermeture de classe chaque année par exemple.

Comment avez-vous réussi à inverser cette tendance démographique ?

A.G. : Il fallait fixer de jeunes actifs. Depuis 2008, notre politique est de créer du logement, notamment social, pour permettre à chacun d’être logé correctement. Il y avait un parc d’habitat pavillonnaire démesuré ; nous avons choisi de créer des quartiers plus denses, comme notre écoquartier aménagé par Nexity Transformation. Sur ces territoires, 1300 habitants vivront sur huit hectares, quand il fallait des centaines d’hectares pour autant de personnes avant. Nous avons créé 500 logements sociaux pour passer de 6 à 14 % de notre parc de résidences principales. Nous allons en construire 250 de plus dans les trois années à venir, pour nous approcher des 20%. Il nous en manquera encore 200 pour atteindre 25 %.

GRAPHIQUE « RATTRAPAGE SUR LE LOGEMENT SOCIAL : LE MARATHON DE SOLLIÈS-PONT »

RATTRAPAGE SUR LE LOGEMENT SOCIAL : LE MARATHON DE SOLLIÈS-PONT 

Comment se conformer aux objectifs du ZAN tout en poursuivant la construction de nouveaux logements ? 

A.G. : C’est facile de donner des objectifs, mais pour nous les maires, c’est moins facile de les atteindre. Le ZAN renforce évidemment la pression sur notre capacité à construire de nouveaux logements, car à Solliès-Pont, nous arrivons au bout de nos disponibilités foncières. Nous avons déjà réalisé plusieurs opérations en renouvellement urbain. La zone agricole est sanctuarisée, et ce n’est pas une mauvaise chose… On devra donc construire encore plus en centre-ville. En même temps, le ZAN est une évidence : on a besoin de zones agricoles et d’espaces verts. Notre territoire est historiquement agricole. Il a perdu en partie cette identité du fait de la forte croissance démographique et du phénomène d’urbanisation.

Le logement, c’est l’arme massive pour redonner du pouvoir d’achat aux gens

Vous avez créé un contrat de mixité sociale, de quoi s’agit-il ?

A.G. : Avec l’État, l’intercommunalité et les bailleurs sociaux, nous nous engageons à produire du logement social. En contrepartie, l’État baisse son quota de logements locatifs sociaux de 131 à 99 entre 2023 et 2025, et renforce les dispositifs de prêt locatif aidé d’intégration (PLAI), qui finance des logements locatifs destinés à des ménages qui cumulent des difficultés économiques et sociales, ainsi que le prêt locatif à usage social (PLUS). Par ailleurs, nous sommes en train de créer un fonds intercommunal de foncier pour encourager une juste répartition de l’effort de production de logements entre les communes.


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Comment accompagner les habitants dans leur « parcours » logement ?

A.G. : L’écoquartier est l’exemple type, car on construit des habitations confortables, modernes et abordables. Quand on sait que le logement représente 40 % du budget des couples en moyenne, ça devient vite l’arme massive pour redonner du pouvoir d’achat aux gens. Si on propose des logements 30 ou 40 % moins chers que les prix du privé, c’est non négligeable. En créant du logement locatif, on a vraiment fait évoluer le marché. Aujourd’hui, on attire une population rajeunie, qui regarde vers l’avenir et non plus vers le passé. Le bail réel solidaire (BRS) permet d’aller encore plus loin pour les primo-accédants puisque le prix du foncier n’est pas à la charge de l’accédant. Nous menons actuellement une opération avec une vingtaine de BRS et six projets sont en cours pour la prochaine période triennale (99 logements sociaux). Il faut absolument diversifier l’habitat avec du locatif social, du collectif, des petites maisons…

En quoi la construction de logements a-t-elle contribué à transformer votre ville ?

A.G. :  L’arrivée de cette nouvelle population indispensable d’actifs avec enfants nous a permis de tout améliorer. Notre ville était déclassée. C’était sale, on ne pouvait pas circuler, pas stationner, il manquait d’espaces publics. À travers les différentes opérations d’aménagement, on a pu repenser la circulation, créer des trottoirs, des espaces verts, refaire des façades, construire des foyers, des espaces associatifs, une maison de santé, réhabiliter notre château pour y installer la mairie, réhabiliter l’église… C’est ça aussi, faire une ville. Je crois qu’on a réussi. La preuve : désormais on ouvre une classe tous les ans.

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